Location de son habitation a sa société: le sort des loyers versés
Un dirigeant peut donner en location une partie de son domicile à sa société. Cette dernière peut alors déduire les loyers versés, à condition de pouvoir le justifier auprès du fisc.
Pour être admis en déduction des bénéfices imposables d’une société, les frais généraux tels les loyers doivent être exposés dans l’intérêt de l’exploitation et appuyés de pièces justificatives suffisamment probantes. C’est à la société qu’il revient d’apporter une telle preuve.
Des loyers déduits à tort
Une société ayant une activité d’expertise comptable et de commissariat aux comptes fait l’objet d’une vérification de comptabilité à l’issue de laquelle le vérificateur lui notifie un supplément d’impôt sur les sociétés. Celui-ci remet en cause le caractère déductible des loyers versés au titre de la mise à disposition de locaux situés au domicile privé du gérant pour y tenir des réunions de travail et y recevoir des clients. À ses yeux, ces dépenses n’ont pas été engagées dans l’intérêt de la société dès lors que celle-ci dispose déjà à son siège social des locaux nécessaires à son activité. C’est donc à tort que la société a déduit ces loyers de son résultat imposable. Pour sa défense, la société argue que ces locaux lui sont utiles dans le cadre de son activité et présente comme preuve des attestations de clients.
L’intérêt pour la société n’est pas prouvé
Le litige est porté devant les tribunaux qui confirment sans surprise le redressement. Pour les juges, les attestations produites n’ont aucune valeur probante car elles décrivent en termes stéréotypés l’intérêt que peuvent représenter les locaux concernés pour la société sans faire état de leur utilisation effective. Dès lors, c’est à juste raison que le fisc a considéré que la société n’a pas établi l’existence et la fréquence des réunions dans les locaux. De surcroît, disposant de bureaux à son siège social, elle n’a pas non plus démontré l’intérêt pour elle de recevoir ses clients au domicile du gérant.
DES REVENUS FONCIERS IMPOSABLES POUR LE DIRIGEANT
Lorsqu’un dirigeant met à disposition de sa société un immeuble dont il est propriétaire, les loyers déduits par la société sont imposables entre les mains du dirigeant au barème progressif de l’IR dans la catégorie des revenus fonciers (plus 17,2 % de prélèvements sociaux). Revenus fonciers qui viennent s’ajouter à ses autres revenus professionnels et aux autres revenus de son foyer fiscal, ce qui peut, selon sa tranche marginale d’imposition, venir alourdir significativement son imposition personnelle. La décision de conserver les locaux nécessaires à l’activité de la société dans le patrimoine privé du dirigeant n’est donc pas forcément opportune et doit être examinée au cas par cas sur la base de simulations chiffrées.
Recourez en toute securité à un auto-entrepreneur
Avec la crise sanitaire, nombreux sont ceux à s’être mis à leur compte. Si faire appel à un de ces nouveaux auto-entrepreneurs paraît simple, gare aux risques.
Deux histoires vraies:
25 ans comme infographiste.
Un illustrateur-infographiste effectuait des travaux pour une société, au titre desquels il était rémunéré sur la base de factures d’honoraires établies par ses soins. Au bout de 25 ans, il a saisi les prud’hommes pour demander la reconnaissance d’un contrat de travail.
Les juges lui ont donné gain de cause, relevant que l’intéressé avait travaillé pendant 25 ans de manière quotidienne dans les locaux de la société, avec le matériel de celle-ci, qu’il figurait dans l’annuaire interne avec une adresse mail et une ligne téléphonique qui l’identifiaient comme appartenant aux effectifs de l’entreprise, qu’il était intégré au sein du service infographie dont il était le responsable et se tenait constamment à disposition
3 saisons de joueuse de basket-ball.
Une joueuse de basket-ball avait conclu avec un club des conventions portant sur 3 saisons sportives, par lesquelles elle s’engageait notamment à participer aux entraînements et aux matchs en contrepartie d’une indemnité mensuelle de 350 puis de 450 euros nets, plus une prime par match gagné, et de la mise à disposition d’un appartement.
Devant les juges, l’intéressée revendiquait l’existence d’un contrat de travail. Là encore, pour les juges, une demande fondée : d’une part, l’indemnité mensuelle convenue n’était pas destinée à rembourser des frais exposés par la joueuse mais constituait la rémunération de ses prestations ; d’autre part, il était stipulé entre les parties que tout manquement de la joueuse à ses obligations entraînerait la suspension immédiate de la convention, ce qui impliquait que l’association disposait sur l’intéressée d’un pouvoir de sanction Des pratiques à proscrire
Si ces deux affaires peuvent apparaître comme des cas particuliers, elles reflètent bien le fait que les juges se montrent intransigeants dès qu’ils débusquent une relation employeur/salarié derrière un contrat de prestation de service. C’est le cas lorsqu’ils constatent que les prestations s’exercent dans des conditions qui caractérisent un lien de subordination juridique permanente.
Et dans ce cas, l’addition peut être salée : poursuites pénales pour travail dissimulé, rappels de salaire, versement à l’URSSAF de cotisations sociales correspondant aux salaires dus, etc.
Soyez donc vigilant lorsque vous souhaitez recourir aux services d’un entrepreneur individuel. L’environnement matériel, notamment, ne doit pas évoquer l’existence d’un lien de subordination. En pratique, bannissez les pratiques suivantes : fixer les horaires et le lieu de travail de votre prestataire, lui fournir du matériel ou des outils, ou encore l’exposer à des sanctions en cas de défaillance dans l’exécution de son travail.